Tania et les tigres du cirque d'europe en région parisienne

Rencontre avec les propriétaires

Elle, c'est Tania, C'est la dernière éléphante africaine à être présente dans un cirque itinérant en France.

Tania est la dernière éléphante à se produire dans les cirques en France. Les autres congénères ont été placées. Rosa et Bambi se sont envolées vers un parc en Hongrie, Mina et Kamala à l’étranger. Brigit et Nelly ne sont [pour le moment] plus mises en piste. Baby est dans un lieu fixe, tout comme Dumba. Pour elle, nous avons pris la décision de rencontrer ses propriétaires.

Photos et vidéos © Julie Lasne/Free Life.
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En compagnie de Julie Lasne, experte de ce type de faune sauvage :

La semaine dernière, le président de Free Life s’est rendu en personne à la rencontre du cirque d’Europe. Un cirque qui, depuis des années, fait parler de lui et dont notre association s’inquiétait de connaître l’état de santé de l’éléphante Tania et des quatre tigres captifs. Accompagné par la conservationniste et éthologue Julie Lasne, spécialiste de terrain concernant les éléphants et les grands fauves sauvages. Julie Lasne est une experte de terrain depuis des années, représentante française de l’ONG international CACH et ayant, à ce titre, participé à plusieurs rapports sur les cirques comme aux missions ministérielles et parlementaires sur le bien-être de la faune sauvage captive ayant abouti à loi contre la maltraitance animale. Ces atouts font que nous savions qu’elle aurait un avis objectif de la situation. Elle précise bien dès le départ qu’ « il n’est pas question d’être pour ou contre la présence des animaux sauvages dans les cirques, car la question a été tranchée par la loi depuis fin novembre 2021 en accord avec les associations et laisse aux cirques un délai de 7 ans pour encore se produire et chercher comment se réinventer sans animaux sauvages ». L’objectif est d’évaluer l’état des animaux. Portent-ils des marques de coups ? Souffrent-ils de stéréotypies significatives ? Les installations sont-elles au norme ? 

C’est alors que démarre une journée de 8 heures d’observation discrète, représentation comprise. Le cirque n’est pas encore au courant de notre présence. Nous observons alors les animaux domestiques. Les frisons sont en plein brossage. Ils sont préparés pour la représentation qui arrive. Chameaux, lamas et poneys sont un peu plus loin. Le terrain est grand, les équidés possèdent une prairie attenante rien que pour eux. Plus loin, nous apercevons le camion-cage avec les tigres à l’intérieur. La cage de détente et le tunnel sont bien montés, mais ne s’y trouvent pas. Nous interpellons alors une circasienne qui nous explique être en pleine préparation de la représentation, débutant dans une heure, et que pour des raisons de sécurité, les tigres sont à l’intérieur. Au loin, Tania est présente. Elle se trouve dans un enclos de verdure, “profitant” du soleil et d’un peu de foin. Nous parviendrons à l’approcher, grâce à différents points de vision, pour observer son état. 

Le problème des villes ?

Au bout de quelques minutes d’observation de l’éléphante, Tania est rentrée sous son barnum. Au moment de nos observations, elle se nourrissait et ne présentait aucune stéréotypie, ni trace de mauvais traitement physique. Pour rentrer, elle fût appelée par un circassien. La demande a été exécutée sans violence. Alors, oui, Tania est seule. Si les présences autour d’elle, comme celle des animaux domestiques et des hommes ne remplaceront pas un congénère éléphant, pour Julie Lasne, ils représentent un bon palliatif à l’isolement comme cela se pratique dans des centres de sauvetage en Afrique pour ces animaux. Malgré tout, nous sommes d’accord que affirmer que sa place n’est pas sur les routes et encore moins seule. Free Life est prêt à prendre en charge l’éléphante immédiatement pour lui offrir un lieu de vie plus adapté. Le cirque ne peut pas se permettre de reprendre un éléphant. Dans tous les cas, même si cela aurait été dans les projets, c’est impossible. Et nous aurions été les premiers à nous y opposer. En attendant, l’heure du spectacle approche à grands pas. Compte tenu du bon état à priori des animaux, nous aimerions aller vérifier cela de plus près. Nous nous présentons.

Les premiers échanges sont méfiants, presque tendus. Qui sommes-nous ? Que voulons-nous ? Après quelques minutes, les circassiens nous exposent leurs problèmes : le suivi permanent des associations, qui les accusent de maltraitance, et le problème des villes qui refusent de les accueillir. Sur le premier point, nous n’avons jamais constaté de nos yeux une quelconque maltraitance physique dans le traitement et la manipulation des animaux. Lors de nos enquêtes, n’a jamais pu être constaté des traces actuelles ou antérieures de sévices physiques. Le seul problème que les enquêteurs de Free Life ont pu noter, hormis la solitude de Tania, se porte sur la représentation avec les tigres sur laquelle nous reviendrons plus tard. Sur le second point, nous rappelons que les communes ne peuvent pas interdire la présence d’un cirque sous seul prétexte que celui-ci possède des animaux sauvages. 

La loi laissant les autorisant à se produire avec leurs animaux, pour une durée de 7 ans, cela est considérée comme une entrave à la loi. C’est punissable. Mais surtout, une telle décision met en péril le bien être des animaux. Comment les propriétaires pourront-ils subvenir à leur besoin, si demain, chaque ville de France bloque l’accès aux cirques ? La loi étant actée, l’heure n’est plus à se positionner pour ou contre, mais d’offrir les meilleures conditions possibles dans l’intérêt des animaux afin d’y améliorer le bien-être animal afin d’éviter l’euthanasie, la taxidermie ou la revente douteuse des animaux. Les cirques possèdent désormais un délai légal de 7 ans pour se reconvertir, il est de notre devoir de les aider à leur proposer des solutions, et de celle des villes de ne pas les empêcher de travailler afin d’éviter que les animaux sauvages ne paient la facture. En revanche, rien n’interdit à un maire de se positionner contre malgré tout.

Pour rester dans la neutralité, nous rappelons que c’est aux villes de fournir des terrains adaptés aux animaux. Un parking bétonné n’est pas et ne sera jamais un endroit adapté pour un lion ou un éléphant. Pas plus que pour des chevaux ou des chameaux. Un terrain avec une grande superficie de verdure permettrait à ces animaux de profiter un minimum de l’herbe fraîche sous leurs pattes – a minima. Ne sont-ils pas assez enfermés dans les camions, lors des voyages ? Laissons-les savourer des plaisirs, aussi petits soient-ils. Et c’est ce que demande le cirque d’Europe aux communes, un terrain adapté. Et il est de notre responsabilité à tous d’y veiller car avant de déclarer la guerre aux cirques, pensons aux animaux. 

« Si vous trouvez un de mes tigres dégriffé, vous pouvez TOUS LES EMBARQUER »

Le show commence. Comme souvent, il est demandé de ne pas filmer ni photographier. Nous outrepassons cette règle, pour garder des traces de notre passage comme toujours. Les numéros s’enchaînent, allant des frisons et des poneys à des numéros humains, aériens ou de cerceau. Tania est bien présente en piste. Les tigres ne sont pas présentés. Une fois la représentation terminée, le couple propriétaire vient à notre rencontre. Ils acceptent d’échanger d’abord brièvement et méfiance avec nous. Les heures passent, la tension se dissipe. Nous échangeons avec eux, jusqu’à la tombée de la nuit, sur leurs animaux. Ils nous expliquent que les tigres ne sont pas présentés suite à un problème de santé du dresseur. Mais ils reviendront sur la piste. En leur présence, nous pouvons nous rapprocher au plus près des tigres afin de vérifier les allégations nous ayant conduits ici : le dégriffage des tigres. Nous abordons également divers sujets, comme la loi concernant les animaux de cirque, les animaux dans leur milieu naturel, les numéros que le cirque effectue, les combats et actions menées par Free Life, puis par Julie…

Concernant les tigres, nous leur faisons part que des rumeurs courent comme quoi l’un d’eux serait dégriffé. Free Life se permet de leur rappeler que, si tel est le cas, cette pratique est illégale et que nous agirons en conséquence. « Si vous trouvez un seul de mes tigres dégriffé, vous pouvez embarquer tous mes animaux sur-le-champ ! », proclame le propriétaire. Nous ne nous gênons pas pour vérifier et, c’est vrai, aucun ne l’est. Nous échangeons alors sur leur numéro avec ces animaux. Nous leur proposons de les aider à les placer dans un refuge. Au minimum, si les propriétaires ne sont pas prêts à s’en séparer, de ne plus les faire sauter dans des cerceaux enflammés comme Free Life avait pu le constater par le passé. C’est le dernier cirque de France à continuer de pratiquer un tel numéro. Tania est, elle aussi, la dernière éléphante à se produire en itinérance en France. Nous leur rappelons que Free Life se positionne contre l’exploitation et l’itinérance des animaux sauvages tout comme Julie Lasne représentante française de l’ONG internationale CACH. Notre avis est écouté. Nous en discutons, avons chacun notre avis sur la question, mais l’échange se déroule dans le calme et le respect des positions de chacun. Concernant la loi contre la maltraitance animale, la famille est consciente qu’ils devront respecter cette loi. Mais dans l’immédiat, il n’est pas question de se séparer de Tania. Ni de la confier aux associations qui les attaquent.

Bien loin de l’image des circassiens agressifs, l’état des animaux, lors de notre visite inopinée est correct. Julie Lasne déclare qu’elle « n’a pas constatée, lors de notre visite, la moindre stéréotypie chez Tania ni de signes révélant de troubles comportementaux, de stress, de mal-être, de maltraitance ni de postures contre-nature durant la représentation comme le poirier [pratiqué chez d’autres cirques] ou susceptibles d’engendrer des problèmes de santé. Dans son enclos, elle est libre de ses mouvements, possède l’espace pour se déplacer et l’ankus n’a pas été utilisé. L’état de Tania est très correct comparé à Maya où, en autres, son mal-être, ses stéréotypies incessantes, les problèmes de pattes et de sa posture générale  même au repos étaient visibles par exemple. Encore une fois, la question n’est pas de savoir si nous approuvons ou non, mais de vérifier si les tigres étaient bien dégriffés et si l’éléphante était en souffrance lors de notre présence. »

Concernant les tigres, le cirque nous souligne de lui-même qu’il n’y a plus de reproduction depuis de nombreuses années. D’une part, à cause de l’âge avancé des félins mais également par manque de place. Malgré leur âge, ces tigres montrent un excellent état général extérieur. Surtout pour des animaux de cirque, ce qui change des félins que nous avons pu croiser : dentition, griffes, poids, fourrure, yeux et réflexes. Ils ne souffrent pas d’obésité, ni de maigreur. Ils ne sont dégriffés, ni édentés. Nous pouvons déjà annoncer que notre entretien avec le cirque s’est soldé  par une rencontre qui s’est très bien déroulée. Chacun respectant les avis des autres et se positionnant mutuellement contre la maltraitance malgré nos différentes visions. 

Un avenir hors du cirque pour Tania ?

Cela fait plus de 20 ans que les associations suivent la trace de cette éléphante africaine, qu’elles soupçonnent d’avoir été battue. Pourtant, le cirque nous affirme le contraire. « Nous n’avons jamais frappé Tania. Tania a été surprise par quelque chose, elle s’agitait. Alors, nous avons dû lever la voix. C’est quand même un animal de plusieurs tonnes, il fallait qu’elle nous écoute ou un accident aurait pu voir le jour ! Une femme en assistant à la scène a cru qu’on était en train de la battre et a joint une association qui depuis relance cette histoire… ». Quoi qu’il arrive, le cirque ne souhaite pas se séparer de son éléphante mais comprend qu’une loi est passée. Et qu’ils devront la respecter. Nous avons donc proposé notre aide pour le placement des animaux non domestiques et le cirque possède nos coordonnées. 

Et les tigres ?

Il en va de même pour les tigres. Ils sont quatre. Quatre vieux félins qui, selon la vétérinaire, sont toujours en très bonne santé. Actuellement, les tigres ne participent plus aux représentations mais devraient retourner sur la piste bientôt. Tout comme pour Tania, nous avons pu proposer à la famille propriétaire de l’établissement la prise en charge de ces derniers. Si jamais le cirque souhaite s’en séparer, qu’importe la raison. Nous pensons qu’il est préférable de les laisser en repos que de continuer à les produire avec un numéro de feu. 

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