Après avoir vécue confinée, Baby est offerte à la Tunisie.

Elle, c'est Baby. Une éléphante africaine, isolée de congénère depuis son plus jeune âge.

Baby est une éléphante africaine âgée de 38 ans. Arrachée à son habitat naturel au Kenya alors qu’elle n’était encore qu’un éléphanteau, elle a été offerte à Yeuk Bauer, alors âgé de seulement 20 ans. Exploitée pendant des années à des fins de divertissement à travers des fêtes médiévales, des émissions télévisées, des clips musicaux, des publicités, des parcs animaliers, des zoos et des défilés en Espagne. Son calvaire, malheureusement, est loin d’être terminé.

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Bien loin d'une vie de « matriarche » :

Pendant plus de 30 ans, Baby a été réduite à l’état d’attraction, forcée de participer à des parades et des numéros humiliants dans des établissements à travers toute l’Europe. Rien ne justifiait pourtant qu’elle soit condamnée à une existence de souffrance, d’isolement et de captivité. Arrachée à l’âge de 2 ans à sa terre natale du Kenya, elle a été capturée pour être livrée à l’industrie du divertissement — un commerce cruel qui détruit des vies au nom du profit et du spectacle. Ces captures, d’une brutalité extrême, laissent des séquelles à jamais : Baby en est aujourd’hui la preuve vivante, marquée à vie par un handicap à la patte arrière gauche.

En 2019, alors que nous suivions depuis de nombreuses années les éléphants exploités dans les cirques, nous étions en contact avec une photojournaliste engagée. Lors d’une de ses enquêtes au parc Saint-Léger, elle parvient à filmer Baby et nous transmet les images. Baby, nous la connaissions déjà. Deux ans plus tôt, nous l’avions vue contrainte de parader lors de la fête médiévale d’Elne, sous la menace d’un ankus.

Aujourd’hui, c’est sous un chapiteau aux rideaux rouge sang, Baby est forcée d’exécuter des numéros absurdes, loin de tout comportement naturel : jouer au basket, porter son dresseur sur ses défenses, ou encore tirer dans un ballon. Et pour quelques euros de plus, les spectateurs peuvent même poser pour une photo à ses côtés. Face à cette exploitation honteuse, nous avons immédiatement alerté les autorités.

De chapiteau en chapiteau :

Pendant toute une saison, Baby figure parmi les principales attractions du parc Saint-Léger, aux côtés du numéro de fauves de Kid Bauer et d’un numéro impliquant des chats — dont l’un forcé de traverser un cerceau enflammé. Mais en décembre 2019, Baby disparaît des radars. Peu de temps après, des habitants d’Aubevoye nous alertent : une éléphante se trouve dans un petit cirque familial. Ce cirque, c’est le Cirque de Paris, dirigé par la famille Gougeon.

Nous pensons d’abord qu’il s’agit de Dumba, déjà présente dans ce même cirque en 2018. Mais à notre grande surprise, c’est bien Baby que nous retrouvons sur place. Peu après, la pandémie du Covid-19 éclate et, avec elle, les confinements successifs. Nous déposons plainte, avec l’espoir de la sortir de là ! Durant cette période, Baby quitte discrètement le Cirque de Paris.

En 2020, elle réapparaît, non plus sous un chapiteau ni au parc Saint-Léger, mais dans une propriété privée : celle de Muriel Bec, dresseuse animalière pour la télévision. Le lieu s’appelle Rendez-vous en Terre Animale. Malgré la fin des tournées, Baby n’est toujours pas à la retraite. Elle devient la nouvelle attraction de ce site, où, contre une centaine d’euros, les visiteurs peuvent “vivre une rencontre privilégiée” avec elle. Isolée de tout congénère, Baby continue d’être exploitée pour satisfaire un public en quête d’exotisme.

En septembre 2022, une lueur d’espoir : le tribunal condamne Yeuk Bauer. Grâce aux plaintes et enquêtes menées par l’association One Voice, il lui est interdit d’exploiter Baby. Serait-ce enfin l’occasion de lui offrir une véritable retraite ? Et en mai 2023, Baby est bel et bien déplacée… sauf qu’elle ne rejoint pas un sanctuaire. Bien au contraire…

Offerte, comme un vulgaire objet :

Le 5 mai 2023, nous apprenons que la Tunisie s’apprête à recevoir un “don” en provenance de France. Ce don ? Une éléphante. Rapidement, nos contacts sur place nous confirment nos craintes : il s’agit bien de Baby. Et elle est destinée au tristement célèbre zoo du Belvédère, là même où, quelques mois auparavant, nous avions dénoncé l’état dramatique d’une ourse à l’agonie.

Nous écrivons immédiatement aux autorités compétentes pour comprendre comment un tel transfert a pu être autorisé. Ce que nous découvrons est révoltant : Yeuk Bauer aurait fait don de Baby à Benoît Metton, un dresseur bien connu dans le monde du cinéma. Ce dernier l’aurait ensuite cédée à un autre dresseur, cette fois basé en Tunisie, avant qu’elle ne soit “offerte” au zoo. Ainsi, Baby a été transférée de main en main, comme un simple objet, privée une fois de plus de toute considération pour son bien-être.

En 2023, nous en sommes là : les éléphantes de cirque sont abandonnées par l’État français. Mina, morte d’un cancer généralisé, était pourtant toujours officiellement déclarée en bonne santé des mois après son décès. Dumba, transférée dans un cirque fixe en Allemagne, est décédée depuis plus d’un an. Rosa et Bambi, envoyées en Hongrie, doivent prochainement être déplacées vers un zoo privé en Inde. Quant à Nelly et Bridget, jugées trop âgées pour continuer les spectacles en France, sont toujours utilisées à l’étranger.

Aujourd’hui, il ne reste plus qu’une seule éléphante de cirque sur le territoire français : Samba. Et pour elle, nous devons faire en sorte que l’histoire ne se répète pas. Elle mérite, comme toutes les autres, une fin de vie digne, dans un sanctuaire, et non dans un enclos ou un chapiteau.

Aujourd'hui, elle vit dans un mouroir.

Une chose est certaine : Free Life ne laissera pas tomber Baby. Nos équipes en Tunisie continueront de la suivre de près, tout comme nous le faisons avec le lion Léo à Sfax. Malheureusement, la législation locale en matière de bien-être animal est quasiment inexistante. Le seul moyen d’envisager le transfert de cette éléphante âgée vers un sanctuaire adapté serait d’obtenir l’accord du zoo. Si cette perspective peut sembler difficile, rappelons-nous que l’éléphant Kaavan, autrefois isolé au Pakistan, a pu être sauvé et relogé dans un sanctuaire digne de ce nom. Pourquoi ne pourrions-nous pas, nous aussi, accomplir l’impossible ?

Le zoo du Belvédère traîne depuis des années une réputation désastreuse. En 2017, un crocodile y a été lapidé à coups de pierres. En 2019, l’association ALVIA l’accusait de négligence et de maltraitance. En 2023, nous recevions des images bouleversantes d’une ourse luttant pour sa survie. Aujourd’hui, la présence de Baby dans ce parc nous inquiète profondément. Trop souvent, cet établissement est dénoncé pour son manque de respect envers les animaux qu’il héberge.

Après une vie marquée par la souffrance, Baby ne peut pas finir ses jours dans un tel lieu. Elle, comme tant d’autres, mérite mieux : un sanctuaire agréé, où ses besoins fondamentaux seront enfin respectés.

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